Courir après la gloire ? — Aumônerie des hôpitaux de Pau

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Courir après la gloire ?

 

 

Éditorial 

Le 14 septembre, Emmanuel Macron a annoncé la création de la fête nationale du sport, qui coïncide avec la fête de la Croix glorieuse. Ce chevauchement montre comment notre société s’accommode de l’effacement des rituels chrétiens. La gloire des héros du sport olympique comble-t-elle le vide laissé ?

En annonçant que le 14 septembre serait la fête nationale du sport, le président Emmanuel Macron a superposé, sans doute à son insu, deux fêtes. Celle de la pratique sportive et celle de la Croix glorieuse, qui vient 40 jours exactement après la fête de la Transfiguration célébrée le 6 août, concluant ainsi un temps de grâce, que certaines traditions en Orient chrétien appellent aussi Carême d’été.

Cette séquence, qui n’a rien à voir avec un été olympique, est particulièrement riche sur le plan spirituel car elle commence avec une promesse, celle d’un Jésus auprès du Père après avoir accompli sa mission, et s’achève avec l’exaltation de la croix, là où effectivement sa mission de salut se termine.

L’occasion est bonne pour réaliser combien notre vie sociale a besoin de ritualité. Le calendrier chrétien disparaissant progressivement, il est remplacé par d’autres rendez-vous. Marquer les dates en en faisant des moments partagés, comme par excellence les anniversaires, est essentiel à l’homme. Une vie humaine vécue sous le signe d’un temps qui s’enfuit rend fou ou dépressif. On parle d’ailleurs de JOstalgie, pour ceux qui souffrent de la nostalgie des JO. Marcel Proust, avec sa fameuse madeleine, avait bien vu que l’esprit humain a besoin de faire durer le passé. Il ne se serait donc pas étonné du succès qu’ont eu les braderies des JO.

Dimanche 15 septembre à Mulhouse, 5 000 personnes se sont pressées pour acheter des T-shirts, bobs, etc., autant d’objets qui vont maintenir la mémoire de la magie des JO. En les regardant ou en les portant l’espace d’un moment, dans les mois et années à venir, leurs détenteurs feront revivre en eux l’émotion positive ressentie pendant les JO.

La décision du président de la République ne doit pas nous laisser goguenards. Les anneaux olympiques posés face à, pour ne pas dire à la place de, la croix peuvent réveiller nos convictions. La gloire olympique, s’il ne s’agit que des lumières braquées sur le podium ou bien de la statistique d’une performance maximale, ne dure pas longtemps. Isabelle Queval, ancienne sportive de haut niveau et philosophe, s’inquiète d’ailleurs de la quête de cette gloire.

Pour elle, s’il « peut à la fois y avoir dépassement et accomplissement » dans la compétition sportive, « il y a surtout un dépassement à outrance qui perd de vue l’accomplissement du sujet ». Elle remarque le surcroît de sens qu’ont apporté les jeux paralympiques : « Ces Jeux paralympiques, dit-elle, offrent un contre-discours à l’idée que la performance est l’essence du sport de haut niveau. La joie des jeux paralympiques est fondée sur autre chose que les records à battre. »

En régime chrétien, on peut partir de cette joie pour remonter à Dieu qui en est à la fois l’auteur et le garant, en faisant résonner à nos oreilles cette parole de l’évangile de Jean : « Comment pouvez-vous croire, vous qui tirez votre gloire les uns des autres, et qui ne cherchez point la gloire qui vient de Dieu seul ? » (Jn 5,44). À méditer, qui que l’on soit, y compris locataire de l’Élysée.

 

 

Arnaud Alibert est rédacteur en chef de La Croix