L’héritage de Gustavo Gutiérrez, apôtre de la théologie de la libération
Éditorial
Gustavo Gutiérrez, « père » de la théologie de la libération, est mort mardi 22 octobre.
Le théologien Gustavo Gutiérrez est décédé au moment où l’Église achève son Synode sur la synodalité. Simple coïncidence évidemment, mais impossible de ne pas repérer le jeu d’écho entre ces deux événements.
Toute sa vie, le père Gutiérrez s’est employé, par la théologie, à aider l’Église à garder le contact avec les réalités vécues par le peuple des fidèles. Car il voyait en elles non pas un objet d’étude, mais un puits où aller chercher le message que Dieu adresse aujourd’hui, en chaque lieu où il y a des hommes. Pour lui, la vérité commence toujours à se faire connaître en bas, à une hauteur humaine.
À Rome, en refusant que le Synode adopte une parole descendante et en limitant autant que possible le penchant naturel au surplomb de la part de la hiérarchie, le pape François s’inscrit dans la même veine. Sud-Américain comme le dominicain, fin connaisseur de sa théologie de la libération sans pour autant en avoir repris tous les codes et les perspectives, François montre, à qui sait voir, la fécondité de l’intuition de ce courant théologique.
Son message est universel. Sous nos yeux, en France comme dans le monde, innombrables sont les situations que le poids de l’ordre établi stérilise ! Le legs de Gutiérrez est que, sans se confondre ni se mélanger mais en s’inspirant mutuellement, théologie et politique peuvent apporter une contribution décisive à leur résolution.
Arnaud Alibert est rédacteur en chef à La Croix